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mercredi 12 novembre 2014 17:56
C’est en 1976 qu’un coup d’état éclate et renverse la présidente Isabel Martínez de Perón pour laisser place à une dictature militaire qui durera jusqu’en 1983. La junte dirigée par le général Jorge Videla fera au total 30 000 disparus, 15 000 fusillées et 1,5 million d’exilés. Ce fut l’une des dictatures les plus brutales d’Amérique latine avec celle de Pinochet au Chili et Bordaberry en Uruguay.
L’ancien régime qui avait obtenu l’organisation du Mondial 1078 laissa donc la place à Videla qui vit là une occasion en or de miser sur le football pour sa propagande. « La seule chose qui n’était pas interdite par le régime était la retransmission d’une partie de football. Le régime voulait que le football ait un effet anesthésiant sur le peuple » raconte l’historien Ezequiel Fernandez Moore dans le documentaire Looking for Buenos Aires.
Le détournement du sport national au profit du nouveau régime sera une des clés de la transformation du pays voulut par les dignitaires du régime. Réprimant les partis politiques, les syndicats, les journalistes ou les simples militants quels qu’ils soient, le régime s’enfoncera lentement dans une terrible répression qui contribuera aussi à sa destruction quelques années plus tard.
Torturés à quelques mètres
Durant ce Mondial 78 et quelques mois auparavant, des protestations internationales s’élevèrent pour boycotter la compétition et marquer ainsi ses désapprobations avec la dictature argentine. À de rares exceptions près, certains joueurs refusèrent de participer la compétition (Paul Breitner et Johan Cruyff boycottèrent, Jorge Carrascosa, capitaine l’équipe nationale se retira un an avant le début du tournoi). C’est pourtant le 1er juin dans l’Estadio Monumental de River Plate que se déroula le match d’ouverture entre la RFA, tenante du titre, et la Pologne (0-0).
À quelques mètres de là, la triste École Supérieure de Mécanique de la Marine dirigée par le sinistre Tigre Jorge Acosta servait de centre de torture pour les opposants politiques. Certains témoignages d’anciens prisonniers, chaînes aux pieds, évoquèrent même avoir entendu les acclamations du public au début du match.
« Jouer pour le peuple »
Même si l’Argentine fut sacrée championne du monde en battant les Pays-Bas en finale, le pays ne fut pas dupe et l’opinion nationale commença à tourner le dos à la propagande du régime avec en vitrine le combat des célèbres Mères de la Place de Mai. Le sélectionneur argentin de l’époque, César Luis Menotti, mena une profonde réflexion auprès de ses joueurs : « Je leur disais que nous savions très bien pour qui jouions, pas pour les personnes dans les tribunes d’honneur mais pour le peuple qui faisait tenir le pays. La véritable représentation du pays était là. »
C’est finalement en 1983 après le désastre des Malouines que le régime céda la place à une démocratie. Le général Videla fut condamné à la prison à vie, en 1985, avant d’être gracié puis à nouveau condamné. Il mourut en 2013, en prison, à l’âge de 87 ans.
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